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15 juillet 2021

  • Perspective sur les prescriptions

Les biosimilaires : ils ne sont plus les petits nouveaux du quartier

Les biosimilaires : ils ne sont plus les petits nouveaux du quartier

La dernière fois que Perspective sur les prescriptionsMD vous a parlé des biosimilaires, c’était dans le numéro d’hiver 2018, lorsque nous avons décrit le succès du pilote du Programme de transition vers les biosimilaires de Green Shield Canada (GSC). Depuis lors, de nombreux progrès ont été réalisés dans le développement des produits biologiques et biosimilaires et des maladies qu’ils traitent.

Mais d’abord, faisons le point... Qu’est-ce qu’un médicament biologique? Contrairement aux médicaments traditionnels, ces produits sont fabriqués à partir de cellules vivantes ou de micro-organismes (comme les bactéries) et sont très compliqués à développer et à fabriquer, ce qui les rend extrêmement coûteux. Cependant, ils offrent des options de traitement pour des maladies graves ou rares pour lesquelles peu ou pas de traitements efficaces étaient auparavant disponibles. Et un biosimilaire? Un médicament biosimilaire a une structure très semblable à celle du médicament biologique d’origine et est produit après que le brevet du médicament d’origine arrive à échéance. Les médicaments biosimilaires peuvent produire les mêmes résultats positifs sur la santé que les médicaments biologiques d’origine, à un coût nettement moindre.

Lorsque nous avons initialement couvert le sujet des biosimilaires (ou produits biologiques ultérieurs) en 2014, ils étaient relativement nouveaux sur la scène, avec seulement quelques-uns disponibles pour traiter une poignée d’affections. Depuis lors, la liste des produits biologiques et des biosimilaires, ainsi que des affections qu’ils traitent, n’a cessé de s’allonger; elle comprend de nouveaux traitements biologiques pour des affections chroniques courantes comme l’asthme, l’eczéma, l’hypercholestérolémie et les migraines. L’énorme croissance des ventes d’une année sur l’autre a fait que les médicaments biologiques sont devenus un facteur important de l’augmentation des coûts des régimes d’assurance-médicaments. Si cette tendance se poursuit – et nous ne voyons aucun signe de ralentissement – il est clair que les biosimilaires sont essentiels pour maîtriser les coûts.

Quelle est la différence de coût? L’examen d’un certain nombre de produits biologiques couramment utilisés et des biosimilaires correspondants montre que la différence de prix varie de 17 à 50 %. En 2018, le Canada aurait pu économiser 807,7 millions de dollars si les biosimilaires avaient été largement adoptés, mais au lieu de cela, nous n’avons économisé que 93,9 millions de dollars en raison d’une adoption lamentable. En d’autres termes, nous n’avons économisé que 12,2 % de ce qui aurait pu l’être1.

Dans un climat d’augmentation rapide du coût des médicaments pour les régimes de garanties, l’adoption généralisée des biosimilaires offre une opportunité claire et significative.

Des preuves solides pour passer aux biosimilaires

Un moyen particulièrement efficace d’accroître l’utilisation des biosimilaires consiste à faire en sorte que les patients déjà traités par un produit biologique d’origine passent au produit biosimilaire correspondant dès qu’il est disponible.

Nous avons examiné trois revues systématiques qui ont étudié les résultats d’un certain nombre d’essais cliniques portant sur la commutation. Les trois revues ont conclu que les preuves disponibles montraient que le passage d’un produit biologique d’origine à un biosimilaire ne présentait pas de risque supplémentaire en matière d’innocuité ni de diminution de l’efficacité :

  • « Sur la base des données actuellement disponibles sur la commutation, soit plus de 170 études, il n’existe pas de données robustes indiquant que le passage d’un biologique de référence à un biosimilaire est lié à des problèmes majeurs d’efficacité, d’innocuité ou d’immunogénicité2. »

  • « Les données sur l’efficacité et l’innocuité n’ont généralement pas montré de différences entre les patients qui ont changé de traitement et ceux qui ne l’ont pas fait. Aucune différence n’a été observée avant et après le changement3. »

  • « La grande majorité des publications n’ont pas fait état de différences en matière d’immunogénicité, d’innocuité ou d’efficacité. La nature et l’intensité des signaux d’innocuité rapportés après le passage des médicaments de référence aux biosimilaires étaient les mêmes que celles déjà connues en cas de poursuite de l’utilisation des médicaments de référence seuls4. »

Avec le nombre croissant d’études cliniques positives et d’expériences réelles (y compris ici au Canada – continuez à lire), la commutation a obtenu le soutien de diverses organisations médicales, dont l’Ontario Rheumatology Association, la Société canadienne de rhumatologie et la Crohn’s and Colitis Foundation aux États-Unis. Au fur et à mesure que les preuves s’accumulent, nous nous attendons à ce que le nombre d’organisations qui soutiennent la transition continue de croître.

En résumé, le principal avantage du passage aux biosimilaires est qu’ils produisent les mêmes effets positifs sur la santé que les produits biologiques d’origine, mais à un coût bien moindre. En outre, une utilisation plus répandue des biosimilaires ouvre la concurrence sur le marché, de sorte que d’autres seront développés, ce qui permettra un accès encore plus large à ces types de médicaments.

L’évolution de la stratégie de GSC sur les biosimilaires

En avril 2016, alors que les biosimilaires étaient assez récents sur la scène, GSC a lancé ce qu’on appelait alors la politique sur les produits biologiques ultérieurs (aujourd’hui le Programme nouveau départ avec les biosimilaires), qui faisait des biosimilaires des produits privilégiés dans nos régimes d’assurance-médicaments pour les patients nouvellement prescrits. En 2018, nous avons élaboré le Programme de transition vers les « Le principal avantage du passage aux biosimilaires est qu’ils produisent les mêmes effets positifs sur la santé que les produits biologiques d’origine, mais à un coût bien moindre. » biosimilaires en consultation avec le Comité consultatif sur l’arthrite (une organisation nationale dirigée par des patients). Ce programme facultatif est conçu pour encourager le passage en toute sécurité de certains produits biologiques d’origine à des produits biosimilaires appropriés. Compte tenu de l’arrivée de nouveaux biosimilaires régulièrement sur le marché, nous avons élargi le programme pour inclure de nouveaux médicaments en 2019, puis en 2021, et une nouvelle extension est prévue plus tard en 2021.

Depuis 2018, la participation au programme de transition de GSC continue de croître et les économies réalisées par les promoteurs de régime s’additionnent. Une analyse des résultats concernant les affections rhumatismales a révélé qu’en février 2021, 55 % des membres du régime admissibles avaient opté pour un biosimilaire, tandis que 14 % étaient restés sur le produit biologique d’origine, généralement parce qu’ils étaient couverts par un autre régime. Cela signifie que 69 % de ces membres du régime ont été remboursés pour le coût du biosimilaire. Parmi les autres, 20 % n’ont pas eu d’autres demandes de règlement et 7 % ont connu un changement de traitement. Pour cet aperçu des membres du régime, leurs régimes ont réalisé une économie moyenne de 8 500 $ par membre par an. Avec l’extension prochaine du programme pour inclure également Humira et les indications gastro-intestinales de Remicade, ces économies ne devraient que s’accroître.

L’un des éléments clés du Programme de transition vers les biosimilaires de GSC est le soutien à la gestion de cas, afin de garantir une expérience positive pour les membres du régime et de combattre l’éventuel effet « nocébo » - lorsqu’une perception négative du traitement entraîne un résultat moins bon que prévu. Ainsi, dans le cadre de notre programme, les membres du régime se voient attribuer un infirmier gestionnaire de cas qui leur fournit, ainsi qu’à leur médecin, un soutien éducatif et de transition.

Dans une étude canadienne récemment publiée5, les chercheurs ont examiné le point de vue des patients avant et après la commutation et ont constaté que le soutien des patients était un facteur clé de la réussite du changement. Bien qu’ils aient des connaissances sur les biosimilaires et le changement de politique à venir, les patients ressentent toujours une certaine « appréhension et anxiété ». Mais une communication ouverte, une notification précoce et un soutien adéquat ont permis d’améliorer la satisfaction des patients et de maintenir le contrôle de la maladie après la commutation. Les auteurs de l’étude ont également conclu que « des stratégies de communication appropriées et efficaces entre les prestataires de soins de santé et les patients concernant la commutation font partie intégrante du succès de ce changement et de la gestion de la maladie. »

Les programmes de transition provinciaux…

Depuis l’introduction du programme de GSC en 2018, un certain nombre de programmes provinciaux de transition ont été lancés. La Colombie-Britannique a été la première à lancer un programme avec l’initiative sur les biosimilaires en 2019, suivie de l’Alberta en juillet 2020 et du Nouveau-Brunswick en avril 2021. Le 18 mai 2021, le gouvernement du Québec a annoncé son intention de mettre en oeuvre une politique d’adoption des biosimilaires et a fourni quelques détails supplémentaires depuis cette annonce (rendez-vous à https://www.quebec.ca/sante/systeme-et-services-de-sante/medicaments-biosimilaires). En plus de ces quatre programmes, l’Ontario a approuvé une politique en février 2020 qui n’a pas été mise en oeuvre en raison de la pandémie de COVID-19. Mais même s’il n’existe pas encore de programme en Ontario, la prévalence des programmes de transition à travers le Canada est forte et croissante.

Programme de transition vers les biosimilaires de GSC – offert dans toutes les provinces et dans tous les territoires (sauf au Québec au moment de la publication)

  • La transition est un programme facultatif que les promoteurs de régime peuvent choisir de mettre en oeuvre.

  • GSC est le premier payeur des demandeurs.

  • GSC accorde 90 jours pour la transition.
  • Après les 90 jours, les membres du régime peuvent continuer à prendre le produit biologique d’origine, mais la demande de règlement est payée au coût du biosimilaire correspondant.
  • Une gestion de cas par un infirmier est proposée pour soutenir les membres du régime et leurs prescripteurs.

Comment le Programme de transition vers les biosimilaires de GSC fonctionne-t-il dans les provinces ayant des initiatives sur les biosimilaires – Colombie-Britannique, Alberta, Nouveau-Brunswick?

  • La transition est standard et ne s’applique qu’aux demandeurs qui coordonnent avec les régimes d’assurance-médicaments gouvernementaux.

  • Les membres du régime doivent effectuer la transition avant la date limite spécifiée par la province respective.

  • Aucune option pour les membres du régime de continuer à utiliser le produit biologique d’origine (processus d’examen des exceptions en place au cas par cas).
  • La gestion de cas par un infirmier de GSC n’est pas offerte; les membres du régime et leurs prescripteurs sont soutenus par l’initiative provinciale sur les biosimilaires.

Une stratégie pour gérer les produits biologiques et les biosimilaires est plus que jamais nécessaire…

Bien que la liste actuelle des médicaments touchés par les programmes de transition vers les biosimilaires ne soit pas longue, les données de 2018 montrent que six des dix premiers médicaments biologiques, selon les ventes au Canada, ont un biosimilaire disponible.8 D’après les renseignements sur les médicaments en cours de développement, les quatre autres peuvent également s’attendre à être confrontés à la concurrence des biosimilaires au cours des trois prochaines années. L’adoption de politiques de transition vers des médicaments biosimilaires pour cette liste courte mais importante de médicaments biologiques représente une occasion formidable pour la viabilité des régimes d’assurance-médicaments, surtout si l’on considère le nombre croissant de nouveaux médicaments biologiques coûteux qui entrent sur le marché et leur expansion dans le traitement des maladies chroniques courantes. C’est le moment de mettre en place une stratégie et de commencer à profiter des possibilités d’économies.

Vous avez besoin de renseignements supplémentaires?

Communiquez avec l’équipe chargée de votre compte pour savoir comment le Programme de transition vers les biosimilaires de GSC peut vous être utile. Ils peuvent fournir une analyse d’admissibilité et une estimation des économies de coûts en fonction de la conception et de l’expérience de votre régime. Ils peuvent également fournir des renseignements actualisés sur les produits biologiques d’origine et les pathologies incluses dans le programme.

Gardez à l’esprit que plus tôt vous mettez en oeuvre le programme, plus tôt vous commencerez à récolter les économies.

Sources

1Les médicaments biologiques au Canada. Partie 2 : Économies liées aux biosimilaires, 2018, site Web du gouvernement du Canada. Consulté le 29 juin 2021. https://www.canada.ca/fr/examen-prix-medicaments-brevetes/services/rapports-etudes/medicaments-biologiques-partie2-economies-realisees.html.

2« The efficacy, safety, and immunogenicity of switching between reference biopharmaceuticals and biosimilars: A systematic review », (étude de 2020), Liese Barbier, Hans C. Ebbers, Paul Declerck, Steven Simoens, Arnold G. Vulto, Isabelle Huys; Pharmacologie clinique et thérapeutique. Consulté le 22 juin 2021. https://ascpt.onlinelibra y.wiley.com/doi/full/10.1002/cpt.1836.

3« Switching Between Reference Biologics and Biosimilars for the Treatment of Rheumatology, Gastroenterology, and Dermatology Inflammatory Conditions: Considerations for the Clinician », (2017), Robert Moots, Valderilio Azevedo, Javier L Coindreau, Thomas Dörner, Ehab Mahgoub, Eduardo Mysler, Morton Scheinberg, Lisa Marshall. Consulté le 22 juin 2021. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28623625/.

4« Switching Reference Medicines to Biosimilars: A Systematic Literature Review of Clinical Outcomes », (2018), Hillel P Cohen, Andrew Blauvelt, Robert M Rifkin, Silvio Danese, Sameer B Gokhale, Gillian Woollett. Consulté le 22 juin 2021. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29500555/.

5« Patient perspectives on the British Columbia Biosimilars Initiative: a qualitative descriptive study », (2021), Caitlin Chew,-Magda Aguiar, Nick Bansback, Michael R. Law, Mark Harrison, Rheumatology International. Consulté le 23 juin 2021. https://europepmc.org/backend/ptpmcrender.fcgi?accid=PMC8102664&blobtype=pdf.

6« Biosimilars Initiative for Pharmacies », site Web du gouvernement de la Colombie-Britannique. Consulté le 22 juin 2021. https://www2.gov.bc.ca/gov/content/health/practitioner-professional-resources/pharmacare/pharmacies/biosimilars-initiative-pharmacies.

7« Webinar coverage: Switching to biosimilars can generate savings, say early adopters », (le 7 avril 2021), Suzanne Lepage, Benefits Canada. Consulté le 8 avril 2021. https://www.benefitscanada.com/benefits/health-benefits/webinar-coverage-switching-to-biosimilars-can-generate-savings-say-early-adopters/.

8Les médicaments biologiques au Canada. Partie 1 : Tendances du marché, 2018, tableau 2.1, site Web du gouvernement du Canada. Consulté le 26 juin 2021. https://www.canada.ca/fr/examen-prix-medicaments-brevetes/services/rapports-etudes/medicaments-biologique-partie1-tendances-marche.html.

Derrière le comptoir

Un nouveau médicament controversé pour la maladie d’Alzheimer

Un nouveau traitement pour la maladie d’Alzheimer a été récemment approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis apportant de l’espoir à de nombreux patients. Nous nous sommes entretenus avec Ned Pojskic, vice-président, Gestion des prestations pharmaceutiques, de GSC au sujet du médicament et de la controverse.

PERSPECTIVE SUR LES PRESCRIPTIONS : Ned, parlez-nous de ce nouveau médicament contre la maladie d’Alzheimer et expliquez-nous pourquoi il s’agit d’un sujet brûlant aux États-Unis.

Ned : Celui-ci est intéressant. Nous le connaissions depuis au moins un an, alors qu’il passait par des essais cliniques. Le médicament s’appelle Aduhelm et la société pharmaceutique est Biogen. Mais d’abord, l’histoire est importante. La maladie d’Alzheimer est une affection très courante, en particulier chez les personnes âgées au Canada, avec plus de 70 000 personnes diagnostiquées chaque année. La cause de la maladie n’est pas connue, mais il existe un lien avec l’âge : les personnes de plus de 65 ans sont à risque et le risque augmente encore plus à partir de 85 ans. D’autre part, le portefeuille de médicaments pour la maladie d’Alzheimer est un véritable cimetière de tentatives ratées. Des dizaines et des dizaines d’agents ont été testés lors d’essais cliniques au fil des ans, mais tous n’ont pas réussi à produire un effet significatif sur la progression de la maladie.

PSP : C’est comme un mystère médical d’une certaine façon.

Ned : D’une certaine façon, oui. Les principes fondamentaux sous-jacents de la maladie d’Alzheimer ont maintenant été révélés, et ils sont en grande partie liés à l’accumulation de ce que l’on appelle la plaque amyloïde. Cela ralentit les impulsions nerveuses dans le cerveau. Vous perdez vos souvenirs; vous perdez la capacité d’effectuer les tâches quotidiennes courantes que vous étiez normalement capable de faire. Un nouveau traitement pour la maladie d’Alzheimer a été récemment approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis apportant de l’espoir à de nombreux patients. Nous nous sommes entretenus avec Ned Pojskic, vice-président, Gestion des prestations pharmaceutiques, de GSC au sujet du médicament et de la controverse.

PSP : Ils savaient donc que la plaque amyloïde était le problème, mais ils ne savaient pas quoi faire. Maintenant, ce médicament va réduire la plaque?

Ned : En gros. On en revient à un problème plus fondamental du développement de médicaments, à savoir que l’on peut connaître les causes générales sous-jacentes de la maladie, mais que si l’on se débarrasse de certaines d’entre elles – dans ce cas, la plaque amyloïde – cela signifie-t-il que l’on change automatiquement l’évolution de la maladie? C’est la question fondamentale pour ce médicament particulier.

PSP : OK, donc c’est le défi et c’est l’état de la maladie. Parlez-nous du médicament et de la FDA.

Ned : Nous avons ce médicament – Aduhelm – qui a passé des essais cliniques. Ces vastes essais cliniques n’ont pas donné de résultats particulièrement enthousiasmants, mais Biogen a observé certains signaux positifs dans l’accumulation de la plaque, bien que les résultats des deux principaux essais cliniques aient été contradictoires. La FDA a approuvé le médicament en se fondant sur le fait que les avantages potentiels l’emportaient sur les risques, mais il a suscité une vive controverse. Le groupe consultatif de la FDA chargé d’examiner les données a recommandé de ne pas approuver Aduhelm, mais la FDA l’a quand même approuvé. Puis trois scientifiques ont démissionné du comité.

PSP : Combien de fois cela arrive-t-il que la FDA passe outre un comité consultatif?

Ned : Cela peut arriver; la FDA n’est pas tenue de suivre les recommandations des comités consultatifs. C’est pourquoi ils sont « consultatifs ». Le plus souvent, ce genre de chose arrive quand il s’agit de ce qu’on appelle un médicament révolutionnaire. Comme il n’y a pas d’autre traitement, le régulateur est prêt à tolérer beaucoup plus d’incertitude et parfois plus de signaux d’innocuité. C’est souvent le cas pour les médicaments contre le cancer, par exemple.

PSP : Donc, en fin de compte, Aduhelm a été jugé suffisamment sûr pour que la FDA estime qu’elle n’aggrave pas les choses en laissant les gens le prendre.

Ned : Eh bien, c’est l’autre partie de la controverse, car ce n’est pas anodin. Chez une certaine proportion de personnes, Aduhelm provoque un oedème cérébral – c’est-à-dire un gonflement du cerveau – et dans certains cas, il provoque des micro-saignements. C’est un médicament administré par voie intraveineuse toutes les quatre semaines – c’est un régime sérieux. Et bien qu’il soit conçu pour les premiers stades de la maladie d’Alzheimer, il est très probable qu’il finira par être utilisé sur beaucoup d’autres personnes. La pression va être forte de la part de tous ceux qui sont prêts à essayer quelque chose là où il n’existe aucun autre traitement.

PSP : Les effets secondaires d’Adulhelm sont-ils plus fréquents que ceux que l’on observe pour les vaccins contre la COVID-19, par exemple?

Ned : Oh oui, absolument. Jusqu’à 40 % des patients prenant Adulhelm pourraient souffrir d’effets secondaires, ce qui constitue un signal d’innocuité très important. Et puis il y a l’incertitude de savoir si ça marche. Et maintenant vous avez cette question qui concerne davantage la population admissible. En général, les agences comme la FDA et Santé Canada ont tendance à approuver les médicaments pour des indications très larges; elles ne font pas de discrimination sur la base des patients qui ont été réellement étudiés. Ils disent « approuvé pour Alzheimer ». On a vu ça pour d’autres médicaments. Ensuite, GSC, en tant que payeur, se débat parce que nous disons : comment pouvons-nous approuver un médicament alors que nous ne savons pas s’il fonctionne pour ce patient? Mais ensuite, nous et nos promoteurs de régime subissons des pressions pour le payer. Il s’agit donc d’un véritable problème lié à la manière dont les organismes de réglementation approuvent les médicaments de manière plus générale.

PSP : Donc ce truc arrive au Canada, et ça va être intéressant pour nous. Est-ce que Santé Canada est plus susceptible de voir ce que vous et d’autres experts dites – que cela n’a pas beaucoup de sens ou est-ce qu’Aduhelm va être approuvé ici aussi?

Ned : Je dirais la dernière. Je ne vois pas Santé Canada venir et dire que nous ne l’approuvons pas. Santé Canada, comme la FDA, a un peu l’habitude ces derniers temps d’approuver un grand nombre de médicaments avec des données limitées par le biais de cette désignation de type découverte.

PSP : Nous devrions souligner qu’Aduhelm est un médicament très cher, non?

Ned : Oui, le prix aux États-Unis est de 50 K$ par an par patient. Les prix canadiens ne sont pas encore connus, mais il est peu probable qu’ils soient très différents. Et beaucoup de gens vont en prendre – aux États-Unis, on estime que jusqu’à un million d’Américains pourraient avoir accès à ce médicament.

PSP : Quelles sont les suggestions pour les agences de santé et les payeurs?

Ned : Une chose qui existe ici, et qui a certainement de l’importance dans cet organisme, est l’Agence canadienne des médicaments, qui combine Santé Canada avec l’ACMTS [Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé] et l’APHC [Alliance pharmaceutique pancanadienne]. C’est important, car les personnes qui évaluent les médicaments du point de vue de la rentabilité côtoient celles qui les approuvent du point de vue clinique et de l’innocuité. On peut donc supposer que les décisions d’approbation sont un peu plus rigoureuses que si chaque agence agissait indépendamment.

PSP : Avec ces experts réunis, le résultat logique ne devrait-il pas être de ne pas approuver ce médicament?

Ned : Ou, à tout le moins, exiger que Biogen étudie davantage le médicament puisque les données sur l’efficacité sont douteuses. Santé Canada dispose d’un mécanisme appelé Avis de conformité avec conditions (ACc). Les conditions peuvent dire quelque chose comme Biogen peut commercialiser le médicament pour l’instant mais doit l’étudier plus avant pendant « X années » et faire un rapport.

PSP : Pour en revenir aux coûts – quelles sont les façons dont nous pouvons au moins atténuer l’impact de cette situation sur les budgets globaux des soins de santé tout en fournissant un certain niveau d’accès.

Ned : Maintenant, je ne sais pas où aboutira notre examen clinique interne de ce médicament – les soumissions ne nous ont pas encore été fournies – mais ce qui pourrait finir par se produire est une sorte d’approche d’accès géré. Rappelez-vous la façon dont nous avons traité les médicaments contre l’hépatite C : nous avons d’abord donné accès aux personnes les plus malades, puis, au fil du temps, nous avons déplacé la frontière vers le bas, pour l’étendre à une population plus large. Même chose avec les vaccins contre la COVID-19. Nous avons d’abord autorisé les personnes âgées, puis nous avons ouvert l’accès à d’autres groupes. Nouvelles de dernière minute : Juste avant la date limite de notre rédaction, la FDA a publié une mise à jour de son approbation d’Aduhelm qui restreint son utilisation prévue. La FDA recommande désormais que le médicament soit limité aux personnes présentant des symptômes précoces de la maladie d’Alzheimer ou des troubles cognitifs légers. Cela réduira considérablement le nombre de patients pouvant bénéficier de ce médicament, qui passera de six millions à 1,5 million d’Américains. Si la nouvelle recommandation n’empêche pas la prescription d’Adulhelm aux personnes présentant des symptômes plus avancés, Medicare et les assureurs privés limiteront probablement la couverture aux personnes présentant des symptômes légers.

PSP : Est-ce le seul levier dont disposeront les payeurs? Pour intervenir et dire que c’est seulement pour cette population selon les études de recherche?

Ned : C’est une façon de faire. Une autre option consiste à acheter Adulhem au niveau national, comme les vaccins contre la COVID-19 ont été achetés par le gouvernement fédéral. Ils pourraient fixer des objectifs nationaux en matière de dépenses. Ils disent à une entreprise comme Biogen : « Nous avons compris, nous voulons faciliter l’accès, que diriez-vous d’obtenir 500 millions de dollars l’année prochaine pour tout ce dont nous avons besoin. » Ainsi, nous ne voyons pas les coûts exploser en raison de l’utilisation; tout le monde a accès, mais il y a un seuil absolu de dépenses.

PSP : Merci de nous avoir renseigné sur ce médicament, Ned. Je suis sûre qu’on en entendra encore beaucoup parler.

Nouvelles de dernière minute : Juste avant la date limite de notre rédaction, la FDA a publié une mise à jour de son approbation d’Aduhelm qui restreint son utilisation prévue. La FDA recommande désormais que le médicament soit limité aux personnes présentant des symptômes précoces de la maladie d’Alzheimer ou des troubles cognitifs légers. Cela réduira considérablement le nombre de patients pouvant bénéficier de ce médicament, qui passera de six millions à 1,5 million d’Américains. Si la nouvelle recommandation n’empêche pas la prescription d’Adulhelm aux personnes présentant des symptômes plus avancés, Medicare et les assureurs privés limiteront probablement la couverture aux personnes présentant des symptômes légers.