et comme prévisions, possibilités, promesses et partenariats pour la santé au travail
Nous espérons avoir attiré votre attention avec notre titre de style « piège à clics » et avoir éveillé votre curiosité pour d’autres discussions et théories sur la COVID-19. On ne risque pas vraiment de se tromper en affirmant que bon nombre d’entre nous sont fatigués de lire au sujet de la pandémie et d’en entendre parler. Cependant, à moins d’avoir vécu dans une grotte (ce qui n’est pas une idée ces temps-ci), il est difficile de ne pas remarquer que chaque jour apporte son lot de nouvelles. C’est ce qui nous a incités à communiquer (en respectant la distanciation sociale, bien sûr) avec certains penseurs perspicaces du secteur des garanties de soins de santé afin de prendre le pouls des conséquences possibles de l’évolution de la pandémie sur la santé au travail.
Sans plus attendre, nous allons donc dévoiler notre gros titre et, espérons-le (surtout pour une édition d’été), compenser certaines des nouvelles les plus lourdes de la pandémie par un jargon propre à nous, les « P ». Roulement de tambour s’il vous plaît… Voici les rumeurs en ce qui concerne les premières leçons tirées de la pandémie en lien avec la santé au travail.
On prévoit un regain d’intérêt permanent pour le bien-être des employés
Bien que le cri de ralliement lancé contre la pandémie ait « aplati la courbe », il semble y avoir un autre mouvement en cours concernant l’intérêt du secteur pour le bien-être des employés, qui plus est un mouvement tourné vers l’avenir. Comme le prédit Mike McClenahan, associé directeur de Benefits By Design : « Nous allons assister à un regain d’intérêt pour le bien-être des employés, notamment la santé mentale, physique, sociale et financière. Bien qu’au début, cette tendance soit une réponse aux problèmes initiaux de la COVID-19, comme les difficultés financières et la solitude, elle se déplacera vers des approches préventives avec des résultats mesurables et se traduira idéalement par une amélioration des résultats de santé ».
Avec l’évolution de la pandémie, le fait de se concentrer sur des thèmes communs dans les sondages d’opinion publique et les enquêtes du secteur – à savoir que les employés luttent sur plusieurs fronts – permettra, espérons-le, de placer le bien-être au premier plan1. De plus, des recherches publiées pendant la pandémie confirment que le bien-être n’est pas simple; ce n’est pas seulement une question de santé physique ou mentale. Il s’agit plutôt de nombreux éléments interdépendants, et la pandémie y fait des ravages :
« La nécessité de trouver un équilibre entre les exigences professionnelles et familiales peut non seulement entraîner une baisse du rendement personnel dans les domaines professionnel et familial, mais aussi une augmentation de l’épuisement émotionnel, du stress et de l’épuisement professionnel2 ».
La pandémie pourrait également contribuer à mettre de nouveau l’accent sur le bienêtre des employés en faisant la lumière sur des problèmes de longue date concernant l’approche actuelle du secteur en la matière. Chris Bonnett, consultant principal à H3 Consulting, explique que « le coût humain et les répercussions financières élevés de la pandémie sont le déclencheur proverbial qui met en évidence les lacunes de notre approche actuelle. Les problèmes sous-jacents persistent dans la manière dont nous gérons le bien-être des employés. Par exemple, bien que les assureurs fournissent davantage de rapports en temps réel, les données sont encore inadéquates, ncohérentes et tardives, ce qui dissuade la rétroaction et l’intervention proactive. Non seulement on passe à côté des comorbidités, car elles sont toujours prises en charge par des programmes discrets, mais le pouvoir fondamental de l’évaluation du leadership, de la culture et des données est également absent. Par conséquent, la santé de la main-d’oeuvre fait rarement partie de la stratégie d’une entreprise. Je prédis que les employeurs de premier plan exigeront désormais une meilleure valeur et une meilleure compréhension de chaque dollar investi en santé. Les employeurs ont besoin d’aide pour traduire les données et fournir des directives sur la manière d’obtenir de meilleurs résultats en matière de santé ».
Deloitte prédit également l’importance de « l’amélioration des conseils et de l’engagement » dans son rapport sur l’incidence de la COVID-19 sur le secteur de l’assurance vie et maladie au Canada. « Les clients font appel à leurs fournisseurs pour obtenir des conseils financiers ou médicaux, un encadrement et du soutien. Ce n’est donc pas le moment de rester dans l’ombre. […] L’engagement à l’égard des clients et des conseils personnels, pertinents et proactifs seront essentiels pour renforcer la marque ainsi que le lien de confiance et les relations durables avec les clients en cette période de crise3. »
La possibilité d’accroître la souplesse des garanties de soins de santé comme jamais auparavant
L’expérience de Shannon MacDonald, directrice générale chez Accenture, montre à quel point nos besoins en matière de santé sont individualisés. En revanche, la plupart de nos structures de régime traditionnelles ne sont pas assez souples pour répondre à ces besoins :
« Quand la pandémie a commencé, ça n’a pas été compliqué de modifier mon assurance automobile. J’ai simplement appelé mon assureur automobile et retiré la couverture de ma voiture qui n’était plus en circulation. Je me suis alors demandé : quels changements pourrais-je apporter à mon régime de garanties de soins de santé? Peut-être que je supprimerais temporairement les soins dentaires, la massothérapie et les soins de la vue. Et puis, j’ajouterais peut-être la livraison à domicile des produits de première nécessité, un entraîneur en ligne, et les frais de déménagement des enfants qui rentrent à la maison pendant la quarantaine. Il semble que tout en mettant en lumière les besoins individuels des membres du régime, la pandémie met également en évidence un besoin universel de souplesse et de choix. Et idéalement, la souplesse et la facilité, comme un accès numérique pour modifier son régime même durant l’année civile. »
En effet, la preuve réside dans la pandémie : les besoins individuels sont divers. Par conséquent, les régimes de garanties de soins de santé ne devraient-ils pas être aussi souples que possible pour proposer le plus grand nombre d’options possible? Les choix apportent une valeur ajoutée certaine, qui peut se traduire par une amélioration du bien-être, de la productivité et de l’engagement. Qu’en est-il de la couverture des services de garde d’enfants en cas d’urgence? Et les frais de soutien aux personnes âgées et de soins de longue durée non couverts par le régime provincial?
Dans un même ordre d’idées, même si les recherches montrent que l’une des conséquences les plus douloureuses de la pandémie est le contrecoup financier, ses conséquences spécifiques sur les finances personnelles sont assez individualisées4. Par exemple, pour certains, il s’agit d’une perte d’emploi, pour d’autres, c’est une baisse du revenu, tandis que pour presque tout le monde, la valeur des investissements se détériore. Et un récent sondage d’opinion révèle que la situation devient de plus en plus précaire; 32 % des personnes interrogées ont manqué un paiement de loyer ou un versement hypothécaire, ou ont dû emprunter de l’argent, et 34 % s’inquiètent d’avoir à le faire5.
Michael Bradie, chef de l’innovation stratégique chez GSC, s’exprime en ces termes : « À cause de l’impact de la pandémie sur l’économie et les finances personnelles, il faudra continuer à mettre l’accent sur le bien-être financier en tant que garantie. Heureusement, l’essor des technologies de pointe permet de prendre plus facilement le contrôle des finances grâce, notamment, à des applications. Nous sommes certains de voir plus de produits sur le marché et, en retour, plus d’options incluses de manière systématique dans l’offre de garanties ».
En outre, toujours dans le but d’assouplir les garanties de soins de santé plus que jamais auparavant, il nous faut assouplir également les sommes affectées à ces garanties. Comme le suggère Ned Pojskic, chef, Relations avec les pharmacies et les professionnels de la santé chez GSC, « la tourmente économique pourrait persister pendant des années, ce qui nécessiterait un examen plus approfondi des régimes de garanties et surtout de la couverture des médicaments. La bonne nouvelle, c’est que cette situation n’est pas aussi mauvaise qu’on le croirait, puisque nous avons un terrain fertile pour mettre en oeuvre certaines des stratégies de gestion des coûts que les employeurs ont depuis longtemps évitées ».
Et bien sûr, il serait extrêmement négligent de discuter de la souplesse des garanties de soins de santé sans parler des services virtuels…
Les promesses se concrétisent avec la virtualisation des soins de santé des employés
Même si vous vivez littéralement dans une grotte, il n’y a pas de meilleur moment poury être, car, à part, notre mode de vie continue à se numériser et nous vivons de plus en plus dans un monde virtuel. « De nos jours, nos appareils mobiles savent qui nous sommes, où nous sommes et ce que nous aimons. En quelques clics seulement, nous pouvons commander un grand café au lait écrémé avec un filet de caramel sur le pas de notre porte. Et sans même avoir à sortir de chez nous, nous pouvons participer à un entraînement virtuel avec des milliers d’autres personnes dans le monde grâce à une application », explique Steve Mast, président et directeur de l’innovation chez Delvinia. « La numérisation dans tous les domaines transforme lentement la société et la culture. La COVID-19 n’a fait qu’alimenter la flambée avec du carburant pour fusée. » En ce qui concerne les soins de santé virtuels, ce carburant pourrait être le coup de fouet nécessaire pour commencer à concrétiser la promesse de soins de santé plus accessibles et plus abordables. Même si les services de santé virtuels se profilent à l’horizon depuis un certain temps – certaines options ayant déjà vu le jour avant la pandémie –, les services de télésanté ont véritablement pris leur envol.
Bien qu’en février de cette année, un groupe de travail dirigé par l’Association médicale canadienne (AMC) ait publié un rapport recommandant au gouvernement fédéral et aux parties prenantes des moyens d’améliorer et d’étendre les soins virtuels à la grandeur du Canada, la pandémie semble être le point de bascule. « Les mesures d’éloignement physique qui visaient à protéger les Canadiens pendant notre lutte contre la COVID-19 ont entraîné l’adoption des soins virtuels par nécessité », explique le président de l’AMC dans un communiqué de presse6.
De même, David Willows, vice-président directeur, Numérique, innovation et expérience de marque chez GSC, commente une étude menée par GSC en mai 2020 pour évaluer les attitudes à l’égard des soins de santé virtuels : « De toute évidence, cette crise et la distanciation physique exigée ont transformé tout le contexte des soins de santé ». Soixante-quatorze pour cent se disent prêts à utiliser un service virtuel pour consulter un médecin, 67 % à faire exécuter une ordonnance dans une pharmacie en ligne et 43 % à avoir recours à une aide en ligne en matière de santé mentale.
Et maintenant que l’ère de la santé virtuelle est véritablement arrivée, ce vétéran du secteur et ancien de GSC est convaincu que l’avenir est à portée de la main. Vous vous souvenez peut-être de Peter Gove dans sa vie précédente en tant que responsable de l’innovation en gestion de la santé chez GSC (qui profite aujourd’hui pleinement de sa retraite). « Jusqu’à maintenant, les provinces avaient toujours été réticentes à l’idée de permettre aux médecins de fournir des soins de santé à distance ou par voie numérique. En Ontario, par exemple, les médecins pouvaient dispenser des soins de santé à distance, mais uniquement en utilisant le réseau de télésanté de l’Ontario. Les employés devaient généralement quitter leur poste et perdre du temps de travail pour se rendre à des rendez-vous médicaux. L’expérience naturelle qui a été menée en raison de la pandémie démontre que tous les types de services de soins de santé sont actuellement fournis par voie numérique, et les utilisateurs semblent très satisfaits. L’acceptation par les utilisateurs de la prestation numérique a connu un changement important. Les soins de santé numériques sont une solution gagnante pour le patient, mais aussi pour l’employeur et lesystème. Le monde a changé de façon permanente. »
Le président de l’AMC est d’accord : « Le train s’est véritablement mis en marche maintenant que les Canadiens ont eu la possibilité d’accéder à des soins virtuels, et qu’ils ont eu une expérience extrêmement positive. Nous devons poursuivre sur cette lancée. Les Canadiens devraient pouvoir accéder aux soins de santé en temps utile et de manière pratique7 ». Parmi les résultats extrêmement positifs d’un sondage de l’AMC réalisé en mai 2020, on note un taux de satisfaction de 91 % chez les personnes ayant consulté un médecin de manière virtuelle pendant la pandémie près de la moitié (46 %) préférerait une option virtuelle comme premier point de contact avec leur médecin8.
Pour la santé des employés, cela signifie donner aux gens ce qu’ils veulent. De nombreuses offres de soins de santé virtuels faisant déjà partie des régimes de garanties de soins de santé, le lancement de nombreuses autres options devrait s’accélérer. Et qu’est-ce qui mène la charge? Les soins de santé mentale virtuels.
La véritable deuxième vague de la pandémie : les problèmes de santé mentale
La détérioration de la santé mentale est considérée comme la deuxième vague de la pandémie et comme « une urgence sanitaire et économique, qui réunit tous les éléments susceptibles d’avoir des effets catastrophiques sur la santé mentale9 ». Steve Mast nous raconte une expérience qui illustre bien comment la contrainte nécessaire de la distanciation physique – et tout ce qui l’accompagne, c’est-à-dire les masques, les écrans de plexiglas et les marques de distanciation – peut contribuer à accroître le sentiment d’isolement et de solitude. « Je faisais quelques courses chez Home Depot et, bien que le personnel ait été très serviable, je me suis senti triste. J’ai donc demandé à la caissière comment elle allait. Elle a arrêté de balayer les articles, s’est mise à pleurer et m’a remercié de le lui avoir demandé. Elle a déclaré qu’entre les masques et les écrans, c’est difficile d’entendre les clients et d’établir un contact avec eux. Ça m’a fait penser que les effets à long terme de la solitude représentent une conséquence grave de la pandémie et que nous devons faire quelque chose. »
Stephen Frank, président et directeur général de l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes, est du même avis : « Comme la pandémie continue d’évoluer, la santémentale et l’accès aux thérapies joueront un rôle essentiel dans la reprise. Si les employeurs n’ont toujours pas réexaminé leurs régimes de garanties sous cet angle, ils devraient probablement le faire. Le travail à domicile, la distanciation physique, le fait de devoir se fier à des appareils pour connecter avec les gens, l’impossibilité d’organiser des événements sociaux ou d’y assister, et bien sûr le virus lui-même sont autant de raisons pour lesquelles les employés peuvent avoir du mal à faire face à la situation ».
Les résultats de divers sondages d’opinion publique continuent de confirmer la hausse des problèmes de santé mentale. De même, selon Erin Crump, vice présidente, Particuliers et santé mentale, « nous commençons à le constater dans nos données tirées des demandes de règlement pour les antidépresseurs. Pour y répondre, les promoteurs de régimes devraient promouvoir activement les programmes de prévention en santé mentale, ou en ajouter à leur offre. De plus, ils devraient se préparer à une forte hausse du taux d’invalidité de longue durée, due à la faiblesse des taux d’intérêt et à la volatilité des marchés boursiers, mais aussi à une augmentation attendue des demandes de règlement pour soins de santé mentale, ou à des comorbidités de santé mentale qui compliquent les demandes de règlement et augmentent leur durée. D’un autre côté, nous pourrions voir davantage de promoteurs de régimes limiter la durée de leur couverture pour invalidité de longue durée ».
Parlant en détail de la façon dont tout cela fonctionnera, Stephen Frank pense que « même si nous apprenons à fournir à distance divers types de services de soins de santé, et même des services physiques comme la physiothérapie et des produits comme les orthèses, pour que cela tienne vraiment, les organismes de réglementation devront nous aider. Ils devront indiquer clairement quels services peuvent être fournis virtuellement, et quel est le champ d’exercice de chaque professionnel de la santé. De nombreux organismes de réglementation n’avaient pas même envisagé le virtuel avant la mi-mars, c’est pourquoi ils ont dû faire volte-face plutôt rapidement pour s’assurer que tout est clair ».
Cela fait réfléchir : avec la prévision d’un regain d’intérêt pour la santé des employés, la possibilité d’assouplir les garanties de soins de santé plus que jamais auparavant, et la promesse de voir les soins de santé virtuels devenir réalité, comment tout cela va-t-il se réaliser?
Des partenariats pour donner vie aux prévisions, aux possibilités et aux promesses
La pandémie a certainement déclenché plus que sa part de mauvaises surprises. Toutefois, à ses débuts, ce fut une agréable surprise de constater l’efficacité (dans l’ensemble) de la collaboration entre tous les paliers de gouvernement et le monde des affaires. L’adoption d’une attitude telle que « nous sommes tous dans le même bateau » peut favoriser une plus grande collaboration et, par conséquent, permettre à davantage d’initiatives de se concrétiser. Par exemple, pour mieux faire face aux problèmes de santé mentale causés par la pandémie, divers gouvernements provinciaux se sont associés à des professionnels de la santé mentale pour faire en sorte que les personnes dans le besoin puissent facilement accéder à des services de consultation gratuits.
La collaboration peut aussi se faire de différentes manières. Bien que le débat sur qui fait quoi dans le domaine des soins de santé soit un thème récurrent, la pandémie pourrait mettre au premier plan diverses questions concernant le champ d’exercice. On pense, par exemple, au débat séculaire sur la manière de tirer parti des compétences des infirmiers et des infirmiers praticiens afin qu’ils puissent jouer un rôle plus important, de manière à améliorer et à accélérer l’accès aux soins. Et qu’en est-il des pharmaciens? Compte tenu de l’expérience réussie avec les vaccins antigrippaux, pourquoi ne pas proposer des tests de la COVID-19 pour alléger la charge de travail des centres de dépistage? Et plus tard, avec un peu de chance, le vaccin contre la COVID-19?
Le cinquième « P »
Étonnamment, les quatre « P » de la pandémie, à savoir les prévisions, les possibilités, les promesses et les partenariats, tendent vers un cinquième P : positif. Bien sûr, positif et pandémie vont rarement ensemble, mais il se peut que des changements positifs soient à prévoir dans la manière dont les promoteurs de régimes et les assureurs abordent la santé au travail.
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